Soitec : la performance industrielle au service du rebond économique
Témoignage de Cyril Menon
Du courage, de l’innovation et de l’intuition industrielle : c’est ce qu’il a fallu aux dirigeants de Soitec pour faire de l’entreprise ce qu’elle est aujourd’hui : un acteur désormais incontournable du marché de la mobilité, un fleuron technologique dont les 850 salariés travaillent principalement en France ainsi qu’aux Etats-Unis et en Asie.
Soitec fournit des matériaux innovants pour toutes les applications électroniques autour de la mobilité (téléphonie mobile, objets connectés, tablettes, électronique embarquée dans le secteur d’automobile, etc.). Son marché se trouve principalement à l’international. En 2013, l’entreprise a vingt ans d’existence lorsqu’elle voit ses revenus divisés par deux et ses marges s’effondrer… Cyril Menon, aujourd’hui Directeur des opérations industrielles, en explique les raisons : "nos marchés n’étaient pas suffisamment diversifiés ; pour remédier à cette situation, la société avait investi massivement dans le solaire mais l’activité ne décollait pas et nous imposait de très fortes charges. Lorsque l’un de nos clients s’est désengagé, nous avons été confrontés à une chute de nos revenus, doublée d’un manque de trésorerie…".
Pour s’en sortir et sauver ce qui peut l’être, l’ancienne start up des années 90 réduit ses coûts de manière drastique : le nombre de salariés passe de 1600 à 850 par le biais de deux plans successifs de sauvegarde de l’emploi réalisés en Europe, aux Etats-Unis et à Singapour ; les activités liées au solaire sont arrêtées ; et c’est une nouvelle gouvernance qui se retrouve à la manœuvre début 2015.
Au cœur d’une telle crise, comment redonner confiance aux collaborateurs et comment les mobiliser?
Si la situation est préoccupante, elle n’est pas désespérée ! Soitec détient deux produits clés dont les dirigeants savent qu’ils seront incontournables pour la filière des objets connectés, le RF-SOI et le FD-SOI. "Nous savions que ces produits seraient nos relais de croissance, c’était certain. Encore fallait-il parvenir à les mettre en production…". Les marges de manœuvre et les moyens sont réduits mais ils existent : les équipes de Soitec s’en emparent, animées par des valeurs partagées et un attachement réel à l’entreprise.
"3 leviers majeurs pour améliorer notre performance industrielle"
Dans cette dynamique, c’est toute la logique de production qu’il faut revoir : "une véritable révolution de la culture opérationnelle" pour passer d’un management par le contrôle, basé sur des indicateurs établis a posteriori, à un management responsabilisant chacun, dans son poste. "Nous avons mis en place des animations intervalles courts (AIC) pour redonner du leadership au terrain, des chantiers Kaizen pour impliquer les salariés dans la démarche d'amélioration continue, des méthodes et outils pour éliminer la non-valeur ajoutée, et des outils de pilotage pour agir sur la performance en temps réel".
Il est également impératif d’augmenter la capacité de production des produits 200 mm RF-SOI. "Le marché était en croissance et il était inconcevable de passer à côté de cette opportunité ; nous nous sommes mis en mode projet AGILE, AUTONOME et VISIBLE. Ce sont les équipes qui ont proposé des idées d’améliorations". Et ça marche : alors que le projet vise à augmenter la capacité de 30% en deux ans, elle augmente de 70% en 3 ans. "Pour tenir compte de nos contraintes de trésorerie, nous avons privilégié l'optimisation de nos procédés et l’amélioration des machines plutôt que l’achat de nouveaux équipements ; cela nous a permis de réaliser une économie d’investissement de 70%".
Troisième levier pour améliorer la performance industrielle : la redistribution des rôles de chacun autour de chaque équipement. "Nous savions que nous aurions besoin de compétences pour développer notre projet industriel ; pour la pérennité de l’entreprise ET pour redonner des perspectives aux salariés, il était primordial que nous préparions cette étape très en amont : c’est ce que nous avons fait dès 2013-2014, alors que nous étions au cœur de la crise…".
Augmenter l'autonomie des équipes
C’est là qu’interviennent les équipes de Quaternaire, dans le cadre d’une démarche baptisée Intervention autonomes de production (IAP). Principes et objectif : faire monter en compétence les opérateurs sur les sujets de maintenance et de procédés, pour que les techniciens puissent se consacrer davantage à la fiabilisation de l’outil de production et aux actions d’amélioration continue d’opération ; les ingénieurs, quant à eux, disposeront ainsi de plus de temps pour travailler sur les procédés et leur industrialisation. "Cette ambition était partagée par toute l’équipe de management des opérations. Pour autant, pour mettre en œuvre le projet, nous avions besoin d’un regard extérieur qui nous permettrait d’affiner notre vision et de la confronter à d’autres expériences".
"Nous avons donc rencontré d'autres clients de Quaternaire, dont le parcours et l'ambition étaient proches des nôtres. Nous soulignerons notamment les échanges croisés avec les équipes du Groupe Armor qui nous ont permis de prendre du recul et de nous projeter vers un modèle plus performant"
A suivi une succession d'étapes structurantes : analyse des tâches à transférer, définition du standard sans perdre en agilité, identification des freins, construction d'un programme diplômant favorisant la reconnaissance par les pairs, mise en place de dispositifs indispensables pour "embarquer" les salariés, les impliquer, et obtenir 100% d'adhésion.
Aujourd’hui, Soitec a réussi son pari… Coûts de production divisés par deux, diversification de ses produits et clients, augmentation de 20% de la marge opérationnelle : les indicateurs parlent d’eux-mêmes… Pour assurer sa croissance, l’entreprise s’est notamment appuyée sur sa composante humaine : elle a su préserver et développer ses compétences clés, mettre en place une organisation responsabilisante et source d’amélioration continue… Une dynamique qu’il lui faut maintenant pérenniser.
Soitec
Soitec est le leader mondial de la fabrication de substrats avancés ; ses 850 salariés, basés en Europe, aux Etats-Unis et en Asie, conçoivent et produisent des matériaux semi-conducteurs innovants, qui permettent aux fabricants de composants électroniques de poursuivre la miniaturisation des puces, d’en augmenter les performances tout en réduisant leur consommation d’énergie.
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